Vigilance Isère Antifasciste

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"Des partis xénophobes avant d’être populistes" : l'analyse d'un chercheur sur les droites extrêmes en Europe et exemples de la libération de la parole raciste

"......  Nous assistons à une déresponsabilisation inquiétante de la parole politique. Poussées par ce mouvement, les idées racistes vont se répandre dans toutes les strates de la société. Il y a quelques années, les électeurs du Front national n’osaient pas dire pour qui ils votaient, même aux sondages d’opinion anonymes. Ce n’est plus le cas actuellement. Les gens n’ont plus honte d’avoir des idées racistes. ......  Plutôt que d’être «d’extrême droite», ils sont «populistes», donc proches du peuple. Dans les années 80-90, cela a permis aux formations de droite radicale de se reconstruire en se détachant du tabou des crimes de la Seconde Guerre mondiale   ........." (Le chercheur Aurélien Mondon, dans Libération 28 août 2018)

Trois illustrations, parmi beaucoup d'autres, de la libération de la parole raciste et de la réhabilitation du nazisme et du fascisme : 

"T’as vu comme je l’ai calmée celle-là ?  J’en peux plus de ces gens-là. De toute façon elle pue ! C’est du Daesh creusois, elle est voilée de la tête aux pieds", lance un agent de la CARSAT Centre-Ouest, (Caisse d’Assurance Retraite et de la Santé au Travail) à  ses collègues, déclenchant les rires de certains.  Fatiha Martin a découvert sur son répondeur ces propos de l'agent de la Carsat, qui avait oublié de raccrocher son téléphone. Elle a déposé plainte. Voir La Voix du Nord, 24 août 2018

Sur un site de la  fachosphère, à l'audience croissante,  issu de l'alt-right des USA et des suprémacistes blancs,  on donne des conseils pratiques "pour être un bon raciste", on forme des "partisans", on veut impulser "un racisme de masse",  et on fait la promotion d'un "hitlérisme participatif". Nous avons déjà parlé de ce site, (voir les 4 articles en Une de la page accueil de  Vigilances Isère Antifascisme) et nous en reparlerons prochainement.... 

Voici comment ce site "analyse"...  les chasses  collectives aux migrants  à Chemnitz  (en Allemagne), organisées au cours  de  "manifestations [prétendument]  spontanées"  :

Chemnitz retablir SA.pngChemnitz  Hitler conclusion.png

En Italie, un prêtre de Pistoïa, Don Massimo Biancalani, résiste au déferlement xénophobe encouragé par Matteo Salvini, le ministre de l'Intérieur et d'extrême-droite. Un groupe fasciste, Forza  Nueva, avait fait irruption, sous la protection de la police,  en pleine messe pour l'intimider.
«Même durant le régime mussolinien, on n’avait jamais assisté à l’irruption d’une force politique dans une église pour intimider le prêtre", s’indigne Don Massimo "Mais désormais, il n’est plus seulement question d’une minorité d’activistes de Forza Nuova. C’est comme si l’ADN des personnes avait été modifié et que l’on voulait minimiser les actes xénophobes», met en garde le prêtre  qui est régulièrement pris à partie sur les réseaux sociaux et même menacé de mort.
Commentaire de Salvini : "Ce prêtre est anti-Ligue, anti-fasciste et anti-Italien". Pour être un bon  italien, il faut donc être fasciste....
  Voir Libération, 28 août : En Italie, le racisme va crescendo

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«Des partis xénophobes avant d’être populistes»

Dans LIBERATION / Aude Massiot — 28  août 2018

Pour le chercheur Aurélien Mondon, la déresponsabilisation de la parole politique en Europe entraîne une expansion des idées racistes à tous les niveaux de la société.

Aurélien Mondon étudie les articulations entre racisme et populisme d’extrême droite à l’université de Bath, en Angleterre. Il explique comment les discours xénophobes peuvent légitimer des actes racistes.

La multiplication des discours politiques xénophobes peut-elle provoquer une augmentation des actes racistes ?

Pas chez n’importe qui. Mais pour des personnes déjà xénophobes ou racistes, entendre un politique tenir des propos comme ceux de Boris Johnson, ex-ministre des Affaires étrangères britannique, qui a comparé début août les femmes en burqa à des boîtes aux lettres et à des braqueuses de banques, peut légitimer le fait de passer à l’acte. Nous avons vu cela après la campagne pour le Brexit. Et j’ai peur qu’on le voie de plus en plus.

Nous assistons à une déresponsabilisation inquiétante de la parole politique. Poussées par ce mouvement, les idées racistes vont se répandre dans toutes les strates de la société. Il y a quelques années, les électeurs du Front national n’osaient pas dire pour qui ils votaient, même aux sondages d’opinion anonymes. Ce n’est plus le cas actuellement. Les gens n’ont plus honte d’avoir des idées racistes.

Existe-t-il des liens intrinsèques entre xénophobie et populisme de droite ?

Cela dépend de la définition qu’on donne du populisme. Un populiste est un politique qui va définir le peuple comme opposé aux élites, dont il donne une vision négative. Dans le cas du Fidesz en Hongrie, de la Ligue du Nord en Italie, du parti Ukip au Royaume-Uni et du Rassemblement national (ex-FN) en France, ce sont des partis xénophobes avant d’être populistes. Ils ont ensuite développé un dispositif discursif qui assimile leur idéologie à leur image du peuple. Dans le cas des populismes de droite, l’élite est présentée comme ennemie de la nation, souvent multinationale, voire juive. Et le peuple comme la «majorité silencieuse». Les mauvais usages du terme «populisme» ont aidé les partis d’extrême droite à gagner en visibilité.

Par quel processus ?

En les définissant comme «populistes», les politiques, les médias et des universitaires leur ont donné de la légitimité. Plutôt que d’être «d’extrême droite», ils sont «populistes», donc proches du peuple. Dans les années 80-90, cela a permis aux formations de droite radicale de se reconstruire en se détachant du tabou des crimes de la Seconde Guerre mondiale. Dès 1991, Jean-Marie Le Pen disait ne pas être gêné par l’appellation «populiste». On leur associe ainsi une base populaire qu’ils n’ont pas forcément. Le cas du Front national est frappant. Le nombre de votants pour ce parti a stagné entre 1988, 1995 et 2002. C’est l’abstention, forte chez les classes populaires, qui a augmenté. Ces formations de droite radicale ont réussi à s’imposer comme l’alternative aux politiques majoritaires, malgré un faible soutien populaire.

Assiste-t-on vraiment à une montée de l’extrême droite en Europe ?

Ce n’est pas sûr. On ne peut pas se baser uniquement sur les résultats électoraux ou les sondages d’opinion pour le définir. En revanche, on constate bien une banalisation des discours et des politiques xénophobes. Il y a vingt ans, il aurait été impossible de voir entrer au gouvernement un parti comme la Ligue du Nord. Mais les pays dirigés par la droite radicale ne sont pas les seuls concernés. Au Danemark, le gouvernement de centre droit vient d’interdire le port de la burqa dans l’espace public. De même avec la politique migratoire française. L’exemple le plus saisissant est celui de l’Australie. Le parti libéral au pouvoir mène une politique anti-immigrés qui fait rougir d’envie les partis d’extrême droite européens.

Ces politiques ne reflètent-elles pas les préoccupations de la population ?

Il est quasiment impossible de savoir ce que pense vraiment la population. Les gens se font une idée de leur société influencée par les discours politiques, médiatiques et de leurs proches. Ont-ils un problème avec l’immigration ou leur dit-on qu’ils en ont un ?



31/08/2018

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