Vigilance Isère Antifasciste

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Finkielkraut et les "français de souche" ( sur le blog "Camp Volant")

Sur le blog  "Camp Volant", le 11 février 2014

Petite remarque, qui démontre les préjugés du "penseur-vedette" . L'ami de "Camp Volant" indique une citation de Finkielkraut :  "Nombre de beurs.... ont un accent qui n’est plus français tout à fait. Mais pourtant ils sont nés en France ! " . S'il sortait de ces salons UMP ou BCBG, s'il sortait de son fanatisme réactionnaire, il entendrait par ex. que dans le Nord, ces beurs qui lui font tant peur ont l'accent ch'ti, à Marseille, l'accent marseillais, etc...

 

FINKIELKRAUT ET LES "FRANCAIS DE SOUCHE"

 

La Droite réactionnaire, xénophobe et raciste a trouvé le penseur ad hoc pour capter l’électorat lepennisé cultivé: Alain Finkielkraut. Ex "nouveau philosophe", enseignant retraité de l’Ecole Polytechnique, idole du Figaro et de la réacosphère, et parfois au-delà, employé et invité dans de nombreux media, il est le philosophe qui donne au rejet de l’immigration une caution académique et distinguée. Sa spécialité.

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Si l’on veut bien débarrasser la pensée de Finkielkraut de «la barbe à papa» de citations scolaires à usage lubrifiant dont il inonde ses livres et ses propos, de ses précautions de Sioux pour éviter l’accusation de xénophobie et de racisme, la thèse que défend le philosophe est en effet très simple et trop bien connue : l’immigration menace de mort l’ «identité française». Une identité imaginaire qu’il s’arroge le droit de définir comme étant celle dont il regrette la «disparition». Ce qui l’amène à comprendre, nous dit-il, « la France de Maurice Barrès et d’Amélie Poulain, la France qui regrette le bon vieux temps où les Français de souche ne croisaient que leurs pareils(sic), la France sépia qui pleure son homogénéité perdue, la France frileuse qui voudrait vivre à l’écart du monde, la France obsidionale qui perçoit tout nouveau venu comme un envahisseur, la France geignarde du “c’était mieux avant”, la France blafarde qui considère que “la France est de moins en moins la France » . Et à se déchaîner, comme dit  Frédéric Martel, tout à la fois contre « Stéphane Hessel, la diversité culturelle, le collectif contre l’islamophobie, le Cran, le Mrap, ACLefeu, le film Intouchables, les féministes, Internet ou encore la techno parade. Ses ennemis sont tous de gauche; ses amis toujours de droite –de droite dure.» (1).

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Ce qui l’entraîne aussi à émettre des opinions stupéfiantes. Et à franchir, par exemple en 2005 dans le quotidien israélien de gauche Haaretz, les limites du tolérable en qualifiant les émeutes des quartiers populaires en France d’ "ethnico-religieuses"(2).

Le 23 janvier dernier, il était l’invité de l’UMP à une causerie. Et sous le regard émerveillé et gourmand de Copé et Mariton -deux fins connaisseurs -, il tint les propos suivants, sommant  «beurs» et autres «banlieusards», abreuvés de son mépris de classe, de  cesser de cracher dans la soupe nationale: "Nombre de Beurs et même de gens qui vivent dans les banlieues, quelle que soit leur origine ethnique, ont un accent qui n’est plus français tout à fait. Mais pourtant ils sont nés en France ! Pourquoi auraient-ils un accent ?! (rires gras dans l’assemblée) Et pourquoi leurs enfants auraient-ils un accent ?! C’est tout à fait sidérant. Mes parents avaient un très fort accent. Mais pas moi ! Ce n’était pas possible puis que je suis né en France ! On se dit mais pourquoi ? En fait, il y a une autre manière de parler la langue, celle du rap, par exemple, dont il est interdit de dire du mal. Ca fait partie de cette sécession culturelle dont je parlais."(3)

Les sorties de Finkelkraut démontrant son ignorance crasse des réalités sont devenues légendaires. Ainsi, sur l’école, déplore-t-il avec aplomb «la fin des notes»  ou encore  ni plus ni moins que «l’impossibilité d’enseigner la Shoah» aujourd’hui. On peut choisir d’en rire ou d’en pleurer.

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Mais son dernier livre, L’identité malheureuse, ainsi que  nombre de ses sorties médiatiques montrent qu’il s’est engagé sur une voie conceptuelle qui le rapproche de plus en plus de l’extrême-droite. Finkielkraut fait en effet désormais sien le concept fumeux de «Français de souche». Il en fait même un usage constant et déterminant dans ses analyses. De quoi s’agit-il ?

Dans un texte intitulé «Les Français de souche existent-ils ?»,  Hervé Le Bras dit l’essentiel. Où donc placer la «souche»-témoin qui garantirait l’appartenance à cette catégorie ? Surtout, à quoi sert en réalité cette notion, sinon à ruiner la conception de la nationalité née de la Révolution française et à légitimer le racisme  ? «La notion de Français de souche est ancienne puisqu’on la trouve dès le début du XIXeme siècle pour désigner des Français nés en France de parents nés en France. Mais, ce terme, comme celui de race, a changé de sens au fil du temps pour en venir à désigner des Français dont la majeure partie de l’ascendance, sinon toute, est française, par opposition à d’autres Français dont au contraire une fraction importante de l’ascendance serait étrangère. La politisation de la question de l’immigration a conduit le Front National à utiliser le terme pour opposer des Français d’origine étrangère, de la même manièrequ’il a patronné un mouvement contre le «racisme antifrançais» par opposition au MRAP. (….) Dans un texte passionnant sur «racisme et nationalisme", Etienne Balibar a souligné que «l’immigration devient par excellence le nom de la race dans les nations en crise de l’ère postcoloniale". C’est un fil conducteur pour comprendre les opérations qui se nouent sur les générations de l’immigration. L’installation d’un dispositif de classement par génération (par un démographe de l’INED, CV) confirme une autre remarque de Balibar sur l’importance centrale prise par le critère généalogique dans les théories racistes, une généalogie «qui est tout sauf une catégorie de a pure nature". La généalogie est ici essentielle pour doter d’une hiérarchie et d’un cadre évolutif le racisme qu’il ne faut pas assimiler à la défense de races immuables. Presque tous les racismes sont fondés sur le mouvement soit la disparition de «la grande race», soit la création d’un type supérieur d’humanité. Ils ont donc besoin d’un mécanisme d’évolution qui, puisqu’il touche au patrimoine biologique ne peut atteindre ses effets que par la succession des générations. A cette fin,ils instrumentalisent la génétique, la démographie et plus particulièrement l’eugénique. Ils sont alors à même d’imposer une conception biologique ou plus exactement vitaliste de la nation car par ses constructions irréelles, «ils entretiennent un rapport nécessaire avec le nationalisme et contribuent à le constituer en produisant l’ethnicité ficitive autoure de laquelle il s’organise" dit encore Balibar.» (4)

Depuis qu’Hervé Le Bras a écrit ces lignes, «Français de  souche» est devenu véritablement une «marque», un étendard de l’extrême-droite française la plus xénophobe et raciste. Finkielkraut peut-il l’ignorer ? L’internet regorge de sites qui prétendent défendre les «FdeSouche», dénoncent le tort qui leur serait fait, les appellent à la révolte contre l’immigration maghrébine et subsaharienne, l’islamisation, le complot juif et franc-maçon, etc. Le simple usage de cette expression est un signe d’appartenance et de ralliement. Il est clair que ce Français de souche- là est blanc-caucasien, éventuellement chrétien, variante catholique. Il est clair que pour cette extrême-droite, c’est un substitut commode – et légal – d’ «ethnie» ou de «race». La nationalité française se trouve ainsi ethnicisée par la généalogie. A quand un  certificat d’appartenance à la France de souche ?

EN 2012  une membre du parti des Indigènes de la République était poursuivie par l’AGRIF, Alliance Générale contre le Racisme et pour le respect de l’Identité Française et chrétienne (sic) dirigée par l’intégriste B. Anthony,  pour "injure raciale"(sic). Elle avait appelé « souchiens » les prétendus «Français de souche» sur un plateau de télévision. L’enjeu était de taille. Cette catégorie de Français existe-t-elle juridiquement et peut-on l’injurier en tant que "race" ?!  Le tribunal correctionnel de Toulouse, ordonna la relaxe et déclara en reprenant la position de Le Bras que l’expression «Français de souche» créée " à l’attention des Français installés à l’étranger, colons ou expatriés, et plus particulièrement à ceux d’Algérie », a pris « son essor dans les années 1980 sur un mode néo-raciste avec la politisation de la question de l’immigration et des enfants de l’immigration que cet artifice de langage tend à matérialiser en race définie en creux, avec en toile de fond cette idée de la disparition de la grande race ou de la revendication d’un type supérieur d’humanité ». Ce tribunal ajoutait que « les recherches de la génétique nous ont appris par ailleurs que nous sommes tous métissés bien qu’uniques, et que la diversité est une règle de la nature ». (5)

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Il est assez sidérant – disons-même pitoyable, de voir un intellectuel régulièrement victime d’attaques antisémites reprendre à son propre compte les armes idéologiques fumeuses de ceux-là même qui le traînent dans la boue. On a opposé à ceux qui combattent l’antisémitisme de Dieudonné des causes psychologiques prétendument atténuantes. Nul doute que les délires de Finkielkraut pourraient aussi relever de la psychanalyse. Mais nous parlons ici des effets, pas des causes.

Dans une récente émission de télé, on a pu entendre Finkielkraut demander au ministre Valls de «ne pas oublier les Français de souche», validant du même coup le  slogan xénophobe selon laquelle «il n’y en a que pour les immigrés». Se défendant avec énergie et une fois de plus de tout racisme après cette émission dans le Figaro, il  eut  cette phrase terriblement révélatrice : « «Mes parents sont nés en Pologne, j’ai été naturalisé en même temps qu’eux en 1950 à l’âge de un an, ce qui veut dire que je suis aussi Français que le général de Gaulle mais que je ne suis pas tout à fait Français comme lui.»(6)

C’est tout simplement la vision de l’extrême-droite que s’applique à lui-même Finkielkraut. C’est la théorie de l’immonde Alain Soral, par exemple, selon lequel, puisque Français de Souche il y a, les autres ne sont que des «Français de branche». Des Français de «papiers» seulement, comme on dit au FN ou à l’UMP. Il se l’applique à lui-même, mais on voit bien que c’est pour s’en prendre à d’autres.

Dans son histoire de la Nation française, fantasmée et expurgée des conditions réelles de l’immigration, les vrais Français ont donné «l’hospitalité»(sic) à des étrangers devenus des presque Français. A moins qu’il ne s’agisse de sous-Français. Il leur enseigne doctement qu’on respecte son hôte, même lorsqu’il vous rejette et vous opprime. Il  est lui-même ce Français de branche qui exige qu’on reconnaisse la «préséance culturelle»(sic) aux Français authentiques.  Qui somme ceux qui ne sortent pas de la (bonne) souche, de s’intégrer, de changer d’accent, de cesser d’écouter du rap, d’arrêter la «sécession culturelle». Celui qui se gausse de l’équipe de France de  foot «black, black, black»(7). Et qui se désespère tous les jours de l’ entêtement de ces «Beurs» et autres «banlieusards» à réclamer l’égalité, à dénoncer les crimes coloniaux de la France ou le racisme et l’islamophobie. Et c’est ce qu’il appelle «son hymne à l’intégration». Mais n’est-ce pas plutôt un hymne à l’ exclusion ?

Finkielkraut  semble se rêver en Barrès de la réaction contemporaine :  sa France c’est "la terre et les morts", plus Corneille & Racine et Arendt, moins le rap, le voile et l’internet. Il paraît seulement oublier qu’aux yeux des nationalistes enragés auxquels il sert de plus en plus dangereusement la soupe sur toutes les ondes,  il y a un élément radicalement inassimilable à la Nation, autrement plus nuisible encore que le Beur, le Black ou le Musulman: aujourd’hui comme hier, c’est le Juif.

 

PS / Je dois ajouter ceci. Dans le débat qui a opposé Finkielkraut à Plantu sur Dieudonné, je me suis trouvé, sans doute pour la première fois, en accord total avec  Finfkielkraut, aussi ahuri que lui de l’insondable stupidité du dessinateur qui a montré son vrai visage en niant scandaleusement l’antisémitisme de Dieudonné. Mais que vaut un antiracisme sélectif ? Rien ! Sinon un appoint à la catastrophique guerre inter"communautaire" qui gangrène depuis quelques années.

http://www.itele.fr/chroniques/grand-decryptage-olivier-galzi/plantu-finkielkraut-debat-tendu-68335

CV 12/02

merci à N.I.

http://www.lemonde.fr/societe/article/2005/11/25/m-finkielkraut-s-excuse-pour-ses-propos-dans-le-quotidien-israelien-haaretz_714143_3224.html

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Notes (par Camp Volant)
1 Il convient malheureusement d’ajouter ceci à la toute dernière affirmation de F. Martel : beaucoup, au-delà de cette "droite dure", dans la droite dite libérale ainsi que dans la gauche molle et "républicaniste" s’inspirent de ses thèses.

Citation tirée de l’excellente critique de L’identité malheureuse par Frédéric Martel, «Finkielkraut offre de mauvaise réponses à de mauvaises questions»,

http://www.slate.fr/story/78960/alain-finkielkraut-identite-malheureuse.

2 http://questionscritiques.free.fr/edito/haaretz/finkielkraut_171105.htm (l’interview traduite de l’anglais). Le philosophe s’est ensuite plus ou moins "excusé" dans Le Monde qui rappelle qu’ "après les excuses d’Alain Finkielkraut, le MRAP a finalement renoncé à porter plainte contre Alain Finkielkraut pour incitation et provocation à la haine raciale, a indiqué son secrétaire général, Mouloud Aounit. M. Aounit a déclaré à l’AFP que "même s’il doutait de la sincérité des excuses de M. Finkielkraut", le Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples) n’avait finalement plus l’intention de porter plainte contre le philosophe. Mouloud Aounit avait annoncé précédemment son intention de porter plainte après les propos de M. Finkielkraut, jugeant que ce texte "d’une violence raciste inouïe" "participe à mettre sur le terrain ethnique et religieux cette insurrection sociale de Français qu’il nomme Noirs ou Arabes". "C’est l’aboutissement d’une bascule idéologique", avait ajouté M. Aounit, rappelant que M. Finkielkraut avait notamment participé à l’appel contre des "ratonnades anti-Blancs" en mars 2005 après des violences en marge de manifestations lycéennes. M. Aounit avait également déclaré vouloir "demander au Conseil supérieur de l’audiovisuel le retrait [du philosophe] de France-Culture, chaîne publique".

3 http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1142505-finkielkraut-stigmatise-l-accent-des-beurs-et-des-banlieues-des-propos-dangereux.html. Je me refuse à indiquer l’adresse de la vidéo qui montre cette intervention de Finkielkraut mise en ligne par un site à fort relent conspirationniste et antisémite.

4 Le Bras Hervé. Les Français de souche existent-ils ?. In: Quaderni. N. 36, Automne 1998. L’immigration en débat (France/Europe) pp. 83-96.
doi : 10.3406/quad.1998.1365
url : http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/quad_0987-1381_1998_num_36_1_1365
Consulté le 10 février 2014

5 cité dans Wikipédia, article «Français de souche», qui serait à réécrire entièrement…

6  Le Figaro, 07/02/2014, citation intégrale :     «Je suis totalement abasourdi. Hier soir, lors de l’émission Des paroles et des actes, j’ai dit que face à une ultra droite nationaliste qui voulait réserver la civilisation française aux Français de sang et de vieille souche, la gauche a traditionnellement défendu l’intégration et l’offrande à l’étranger de cette civilisation. La gauche en se détournant de l’intégration abandonne de fait cette offrande. Manuel Valls a expliqué que nous avions tous trois -lui-même, David Pujadas et moi – des origines étrangères et que c’était tout à l’honneur de la France. J’ai acquiescé mais j’ai ajouté qu’il «ne fallait pas oublier les Français de souche». L’idée qu’on ne puisse plus nommer ceux qui sont Français depuis très longtemps me paraît complétement délirante. L’antiracisme devenu fou nous précipite dans une situation où la seule origine qui n’aurait pas de droit de cité en France, c’est l’origine française. Mes parents sont nés en Pologne, j’ai été naturalisé en même temps qu’eux en 1950 à l’âge de un an, ce qui veut dire que je suis aussi Français que le général de Gaulle mais que je ne suis pas tout à fait Français comme lui. Aujourd’hui, on peut dire absolument n’importe quoi! Je suis stupéfait et, je dois le dire, désemparé d’être taxé de racisme au moment où j’entonne un hymne à l’intégration, et où je m’inquiète de voir la gauche choisir une autre voie, celle du refus de toute préséance de la culture française sur les cultures étrangères ou minoritaires. L’hospitalité se définit selon moi par le don de l’héritage et non par sa liquidation.»

http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2014/02/07/31003-20140207ARTFIG00274-alain-finkielkraut-une-partie-de-la-gauche-a-perdu-la-raison-et-la-memoire.php

7 Voir Sindibad «Finkielkraut, l’homme qui sait compter les nègres», sur le livre de S. Fontenelle, «La position du penseur couché».http://sindibad.fr/spip.php?article101



12/02/2014

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