Le Fontanil (Isère) - Démagogie anti-migrants, affabulations, droit de réunion bafoué ... et humanisme, solidarité, antiracisme et bon sens
Le Fontanil, une jolie petite ville riche (2800 habitants) aux portes de Grenoble. Depuis 3 mois, la commune est saisie d'une véritable furie xénophobe déclenchée par le maire et ses soutiens. Le motif : l'Etat prévoit de mettre à l'abri, le temps d'examiner leur situation et demande, dans un ex-hôtel Formule 1 situé sur la zone industrielle, 96 réfugiés demandeurs d'asile.
Humanistes, solidaires, antiracistes ou simples défenseurs du droit et du bon sens ont fort à faire.
Et voilà qu'à présent, le maire LR interdit une réunion qu'ils avaient programmée !
Entrave à la liberté de réunion et affabulations du maire
Des élus ainsi que des habitants du Fontanil, avaient prévu une réunion, le 28 juin 2017, pour discuter des propositions concrètes afin de contribuer, à leur niveau, à l'accueil des migrants qui devraient être hébergés, à partir de cet été dans l'ex- F1 (et suivis et pris en charge pour l'essentiel par l'Etat et des associations d'accompagnement social délégataires de service public).
"Trouble à l'ordre public", a prétendu le maire (LR), Stéphane Dupont-Ferrier, pour justifier son refus de prêt de la salle !
Continuant à entretenir un climat anxiogène tout comme l'agressivité et les intimidations dans sa commune,, le maire invente et travestit des informations que lui aurait communiquées la gendarmerie, pour justifier cette scandaleuse et manifeste atteinte au droit de réunion.
C'est ainsi qu'il a fait courir le bruit selon lequel nos amis les pandores auraient intercepté des courriels échangés entre militants de RLF - Ras L' Front.
Leur seule présence serait évidemment en soi suspecte voire dangereuse et criminelle : pensez-donc, ces affreux gauchistes se disent antifascistes, antiracistes, et pour la solidarité avec et entre tous les démunis et tout comme ATD-Quart Monde, ils sont en faveur de l'aide envers toute détresse, , ... , ils font même savoir qu'ils ne veulent "Ni Le Pen, Ni ses idées" ! De dangereux provocateurs !
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Or, il se trouve que strictement aucun mail n'a circulé au sein de RLF pour évoquer cette réunion, et encore moins pour se préparer à l'investir ! Tout au plus, ici, sur ce site "Vigilances Isère Antifascisme", au détour d'un article, a été reprise cette info donnée par le Dauphiné Libéré : "Vous voulez aider à l'accueil de ces migrants : réunion le 28 juin à 18 heures à la salle Play Bach"
Et puis, à qui donc le maire fera-t-il croire que la Police et la Gendarmerie n'ont pas d'autres choses plus cruciales à faire que surveiller la correspondance que s'échangent les humbles et pacifiques membres de Ras L' Front ?.
Les affabulations du maire pourraient prêter à sourire, mais reste que tout en inventant ce grotesque prétexte, il se permet de bafouer un droit élémentaire.
Pour le moins, il faudrait que s'exprime avec force et clarté une protestation contre l'interdit édicté par le maire, et que ceux des élus et habitants du Fontanil qui se réclament de l'humanisme, du droit ou de l'antiracisme, ne se laissent ni diviser, ni intimider, ni intoxiquer.
Quand les excités et provocateurs jouent les victimes
Lors du Conseil Municipal de fin juin, trois élus ont été pris à partie, avec agressivité, car ils osent dire leur désaccord avec le maire et avaient cherché à dédramatiser cet hébergement de demandeurs d'asile lors d'une précédente réunion qui s'était déroulée le 15 juin. "Trouble à l'ordre public rencontrés lors du la réunion [des pro-accueil des demandeurs d'asile] du 15 juin", a prétendu encore le maire.
En réalité, malgré les tensions provoquées par les "Non aux 96" venus en tee-shirt blancs (mais dont on devinait pour beaucoup la vraie couleur, un mix de FN-LR) et en manif jusque devant la salle, cette "réunion de dédramatisation", avec le concours des associations CIMADE, APARDAP (Association de Parrainage Républicain des Demandeurs d'Asile et de Protection) et ADA (Accueil Demandeurs d'Asile), a été plutôt réussie, comme en atteste l'article du DL. Avec une assistance nombreuse et attentive aux explications, informations et témoignages concrets fournis. Des "anti-migrants" ont même pu, (longuement !) s'exprimer. Un compte-rendu a été distribué dans les boîtes à lettres des habitants du Fontanil :
Compte-rendu de la réunion du 15 juin, rédigé par 3 élus du Fontanil :
"Accueil des demandeurs d'asile au Fontanil : des citoyens, des êtres humains et des moyens."
Les manifestants anti-migrants et partisans du maire prétendent qu'on leur aurait interdit l'entrée de la salle, et ce violemment, évidemment : en réalité, c'est tout juste si des personnes leur ont expliqué qu'ils pouvaient entrer dans la salle, mais sans banderoles et sans chercher à faire du chahut et qu'il y a eu une légère bousculade. En réalité, après avoir fait tout un vacarme perturbateur au-dehors, tapant sur les vitres avec des cris "on veut rentrer, on veut rentrer !", nombre d'entre eux ont rapidement quitté la salle après y avoir pénétré, bien peu intéressés en fait par les informations et témoignages qui pouvaient s'y dire.
Le but évident de la plupart de ces partisans du maire était bel et bien de semer le trouble, puis d'inverser les rôles et de venir jouer les victimes.
Des propos lancés par certains d'entre eux témoignent d'ailleurs de leur grande "modération" et de leur esprit pacifiste : "Oui je suis raciste !", "Qu'ils crèvent en mer ! " (il ne s'agit là que de propos entendus par l'auteur de cet article, on peut supposer qu'il y en a eu d'autres, tout aussi "modérés").
Une dame, passablement excitée, s'est mise à frapper une personne (de RLF) avec une bouteille : qu'on se rassure, c'était une bouteille en plastique, vide de surcroît ...
Exprimer sa peur ou chercher à attiser et exploiter les peurs ?
Exprimer sa peur, c'est légitime, a-t-il été dit le 15 juin au cours de la "réunion de dédramatisation". Il y a en effet des peurs très rationnelles.
Mais il y a aussi des peurs totalement irrationnelles. Surtout, il y a une grande différence entre exprimer une peur et attiser les peurs !
Attiser et exploiter les peurs et fantasmes racistes, des peurs de riches et de privilégiés, des peurs mêmes les plus absurdes, en recourant aux fake-news façon Trump ou aux bobards et intox diffusées par notre fachosphère hexagonale : voilà en réalité, en plus des tentatives d'intimidation et de division, la méthode employée par le maire et ses partisans .
- "J'ai peur qu'on m'impose la charia". Phrase lancée par une femme au cours de la "réunion de dédramatisation" du 15 juin ( elle s'était auparavant montrée très agressive et excitée auprès du public dans la salle) qui a tenu à se présenter elle-même comme étant de droite, en conclusion de sa longue intervention au micro ( à elle, le micro n' a pas été ôté ! bien qu'elle ne posait aucune question précise...), après avoir fait longuement part de son merveilleux engagement économique et social. Mais un gros mensonge fait douter de la sincérité et dela spontaneïté de son émoi : pour montrer à quel point elle est dévouée pour son prochain et pour les pauvres, elle a affirmé s'être investie dans le soutien scolaire : " J'ai été responsable du soutien scolaire, responsable à Acodomia". Acodomia, en réalité, est une boîte privée de cours particuliers.... Et puis, vraiment ? "menace de charia" au Fontanil ? Comme si la première préoccupation des demandeurs d'asile, ces personnes en détresse, allaient être de convertir de force tout le monde à un islam le plus rigoriste et fanatique ! Ne nous prendrait-on pas pour des imbéciles ?
- Fin avril, le maire prenait l'initiative d'une pétition bourrée de "fake façon Trump", ou si l'on préfère, de grossiers travestissements des réalités.
" il n'est pas acceptable que seule notre commune de 2800 habitants concentre à l’accueil des demandeurs d’asile de la quasi-totalité du département de l’Isère... "...
".... L’Etat va-t-il engager à ses frais les travaux d’extension d’un groupe scolaire ?...."
"... Ce futur centre d’accueil de demandeurs d’asile est situé dans une impasse de la zone d’activités et n’est pas desservi par les transports en commun..."
- On n'insistera pas : outre qu'il existe déjà d'autres CADA (Centre d'accueil de demandeurs d'asile) en Isère, il est prévu par l'Etat la reconversion en Cada ou en Prahda (“Programmes d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile”, selon le nouveau terme administratif ) de deux autres ex-hotels Formule 1 en Isère, l'un à Chanas, l'autre à Chasse-sur-Rhône.
- Et pour celui situé au Fontanil, ce n'est nullement à un déferlement de migrants qu'on assistera : il est prévu en tout et pour tout 96 places pour des réfugiés-demandeurs d'asile, des adultes seuls ou des couples sans enfants. Et non pas "300, 10% de la population" comme le prétend le maire dans cette pétition.
- Qu'on se rassure donc aussi , l'école non plus ne sera pas envahie par des migrants...
- A une quinzaine de minutes à pied de ce futur CADA/ PRAHDA, sont en réalité accessibles lignes de tram et de bus...
- En mai, le maire avait organisé une première "réunion de mobilisation" contre l'accueil des demandeurs d'asile. Des patrons de la ZI sont venus à la rescousse, car comme l'écrivait le DL (daté du 23 mai), ils sont "opposés à ce Prahda aux portes de leurs bureaux, entrepôts ou ateliers" :
« Recevoir ces gens, c’est gênant pour nous et dangereux pour eux. La ZI est très dangereuse, beaucoup de camions y circulent »
- Ainsi donc, ces migrants et réfugiés, qui ont dû au cours de leur périple affronter beaucoup de dangers, ne sauraient pas se prémunir de la circulation ni emprunter les trottoirs ?
« Au Fontanil, on accueille à l’école, à la cantine, au centre de loisirs, des enfants de migrants, mais en quantité modérée" (le maire)
- A notre connaissance , et cela a été confirmé au cours de la réunion pour un "accueil digne et humain" du 15 juin, aucun migrant ou famille de migrants n'a été accueillie au Fontanil. Le maire ne ferait-il pas, de façon assez révélatrice, la confusion et l'amalgame entre migrants-demandeurs d'asile et des familles d'origine immigrée ancienne (certainement bien peu nombreuses au Fontanil), préférant les désigner sous le terme inquiétant de "migrants" ?
"cela va amener de la prostitution, des trafics en tout genre." (le maire)
- Faut-il commenter ces discours d'un maire, un responsable, (des propos que le DL disait être tenus avec "pédagogie et modération"), et qui font écho aux clichés xénophobes répandus en abondance sur la fachosphère ?
"Après ces explications dites de manière assez responsable, le débat s’est engagé avec la salle, et on a entendu des choses moins pondérées" : avec cette pudique remarque du correspondant du DL, on devine combien les vannes du racisme se sont ouvertes ...
Rappelons simplement que dans l'immense majorité des communes, sinon leur totalité, où ont été ouvert des lieux d'accueil pour les demandeurs d'asile ou migrants, et en dépit de violentes et démagogiques protestations des exploiteurs de xénophobie, aucun incident n'a été signalé, le voisinage ignorant même souvent l'existence à sa proximité d'un CADA ou autre structure de ce genre.
Démagogie xénophobe et réalités
On le voit, peu importe que les charges de ce futur CADA (Centre d'accueil de demandeurs d'asile) soient assumées sur le budget de l'Etat et non pas par la commune, peu importe qu'un suivi administratif et social soit prévu, le maire et ces soutiens directs ne rechignent pas à attiser fantasmes xénophobes et racisme. Et à l'aide d'affabulations et d'intimidations, ils en arrivent à présent à interdire une banale réunion communale !
Dans cette furie xénophobe, on devine l'influence de la la fachosphère et de son abondante propagande internet faite de grossières intox. Deux exemples, parmi ces multiples bobards et falsifications racistes fabriquées et diffusées par les mouvances d'extrême-droite et même par les rangs LR :
Le maire du Fontanil emboîte aussi le pas au Front National, qui avait lancé une véhémente et démagogique campagne baptisée "Ma commune sans migrants !" : c'était notamment à l'automne 2016, quand il s'agissait de "relocaliser les migrants de Calais" dans des CAO (Centres d'accueil et d'orientation). Cette campagne du FN avait d'ailleurs été vite copiée par le Président de la Région Rhône-Alpes-Auvergne, le très droitier LR Laurent Wauquiez...
- Rappelons ce seul exemple, celui de St Hilaire du Rosier (Isère) : FN et racistes divers s'étaient déchaînés et avaient utilisé peurs xénophobes et intimidations directes. Il y avait même eu des coups de fusil contre le centre de vacances géré par un organisme social issu de l'EDF et qui était prévu pour cet hébergement transitoire de réfugiés et migrants.
- Et que ce soit à Saint-Hilaire, ou dans toutes les autres communes où on été ouverts ce genre de lieu d'accueil, et en dépit de ces honteuses campagnes racistes, on s'est aperçu bien vite que la solidarité humaine fonctionne, que migrants et réfugiés ne sont pas des sauvages, et que bien souvent, ils apportent beaucoup à la vie des communes, non seulement en terme d'échanges et d'ouvertures humaines, mais souvent aussi pour l'économie locale, avec des commerçants ravis par ce complément de clientèle... Un exemple, parmi beaucoup d'autres : dans cette commune de la Loire : A Saint-Denis-de-Cabanne, les migrants font de bons voisins (Libération, 18 décembre 2016)
De leur côté, les néofascistes lyonnais de "Génération Identitaire" se sont empressés d'apporter leur appui et de surfer eux aussi sur la vague xénophobe déclenchée par le maire du Fontanil, en montant un de leurs habituels coups de buzz : ils s'étaient installés sur le toit du F1 de Chanas. "Priorité aux français dans la détresse", prétendent revendiquer les Identitaires et toute une mouvance LR- Extrême-Droite.
- Pourtant, les mêmes s'élèvent souvent contre la construction de logements sociaux, ou contre l'ouverture de centres d'hébergement d'urgence pour SDF et autres personnes en difficulté..
- De plus, non on ne donne pas "tout aux migrants, rien pour les français". En réalité, l'Etat , par le biais de la CDC (Caisse des dépôts et consignations, grand financeur et acteur du logement social) a racheté une soixantaine d'hôtels Formule 1, situés en divers endroits en France pour y abriter soit des personnes en manque urgent de logement, soit des demandeurs d'asile ou migrants : 10 000 places de logement d'urgence sont prévues en tout, 5000 pour les uns, 5000 pour les réfugiés / demandeurs asile. Voir Libération, 1er juin 2017 => Non, l'Etat n'achète pas 62 hôtels Formule 1 «pour loger des migrants»
0,000525 demandes d'asile par habitant, acceptées en 2016 par l'OFPRA (ou 525 par million d'habitants) : telle est "l'insupportable charge",le "dangereux appel d'air" que nous subissons en France.. (source Eurostats - AFP)
On laissera le dernier mot au Secours Catholique de Drôme-Ardèche, qui s'est exprimé dans le Dauphiné-Libéré, au nom de plusieurs associations soucieuses de la dignité humaine à l'égard des migrants.
Ces associations se disent très préoccupées par la situation des migrants les plus fragiles : les primo-arrivants, les déboutés du droit d'asile et les sans-papiers. Si les demandeurs d'asile sont relativement bien pris en charge, explique le Secours Catholique, il existe de trop nombreuses situations sans solution. Pour ces associations, en plus de places d'hébergement supplémentaires, il faut donner la possibilité aux demandeurs d'asile de travailler. Il faut aussi appréhender le cadre juridique différemment, avec moins d'hypocrisie et plus de pragmatisme dans la politique de régularisation.
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"Ni Le Pen, ni ses idées !", décidément, un slogan très justifié !
Le Pen n'était pas présente au Fontanil. Mais ses "idées" et méthodes étaient bien là. Imitées, reprises, développées, appliquées.
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