Vigilance Isère Antifasciste

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Les hebdos utilisent l'islamophobie pour augmenter leurs ventes

Les hebdos utilisent l'islamophobie pour augmenter leurs ventes

 

Ces dernières semaines, les hebdos ( Le Point, L'Express, etc...), pour augmenter leurs ventes, ont rivalisé de couvertures "choc" que l'on a vues partout à la devanture des marchands de journaux. 

Pour eux, agiter à leur tour peurs et fantasmes sur l'islam semble être un filon rentable.

Exemple parmi d'autres : le 15 novembre 2012, L'Express, sous le titre "Le vrai coût de l'immigration", présente à son tour une femme en burqa, cette fois devant un guichet de la CAF...

Avec cette Une, on aurait pu croire  que L'Express se transformait en hebdo du Front National, illustrant par cette couverture les fantasmes racistes en vogue :   l'immigration assimilée à l'intégrisme islamique (alors que selon les chiffres policiers,  il n' y a pas plus de 200 ou 300 cas de port de burqa en France), une  prétendue "immigration  islamique"  qui de surcroît viendrait piller nos prestations sociales...


Pourtant, l'article à l'intérieur du magazine démentait  largement ces peurs et intox propagées par la droite et l'extrême-droite.

Notamment en reprenant  des enquêtes sérieuses déjà diffusées ailleurs, (voir ici),  qui concluent que l'immigration, bien loin de représenter "une charge insupportable" (comme répètent à qui veut les entendre Le Pen et ses imitateurs)  pour les budgets sociaux  du pays, lui assure un bénéfice de 12 milliards d'euros annuels.

 

Mais qu'importe les faits : ces propriétaires  et directeurs de magazines sont persuadés que flattter les phobies et préjugés racistes, c'est  bon pour leur commerce. Les explications  du directeur de publication de L' Express, Christophe Barbier,  (ci-dessous, dans Télérama), sont à la fois cyniques et révélatrices.

Ce sont ces mêmes directeurs de média qui alimentent eux-mêmes la propagande raciste ( avec des photos et des montages similaires à ceux qu'on trouve sur les sites d'extrême-droite les plus acharnés)  et viennent  ensuite nous faire la morale en nous expliquant  qu'il faut "entendre les électeurs du Front National", qu'il faut "entendre leur souffrance" !...

 

L'historien Gérard Noiriel a mis en lumière la lourde part de responsabilité d'un certain genre de  médias, avec leur recherche de l'info-spectacle, dans les précédentes grandes vagues de racisme et de montée des extrêmes droites, durant l'affaire Dreyfus ou pendant les années 1930 par exemple ( voir son ouvrage " Immigration, antisémistime et racisme en France" )

 

Assez de lepénisation des esprits et des médias !

 

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Télérama, le 15 novembre 2012 :

Malaise à “L'Express” après la une sur “Le vrai coût de l’immigration”

Face à sa rédaction, Christophe Barbier s'est expliqué sur la couverture provocante de son magazine. Une mise au point qui laisse les journalistes de “L'Express” perplexes.

 

 “Immigration" : que cache la une de L'Express ?”


Ce matin, jeudi 15 novembre 2012, à 10 heures, Christophe Barbier avait rendez-vous avec sa rédaction.

Pour une mise au point qui s'annonçait houleuse sur la politique de une de L'Express. La dernière, titrant « Le vrai coût de l’immigration », montrant une femme voilée devant une Caisse d'allocations familiales, ayant provoqué – comment dire ? – un gros malaise.
Du coup, il y avait du monde à l'assemblée générale organisée à l'initiative de la SDJ. Presque toute la rédaction, Web compris. Face aux critiques extérieures qui fusent depuis deux jours – titre racoleur qui ne reflète pas le dossier, l'immigration ne peut être résumée à une femme voilée, etc – Christophe Barbier s'était jusqu'ici justifié sur le thème « Dans l’esprit des Français, c’est une immigration venue de la Méditerranée qui pose problème. »
Face à sa rédaction, le discours s'est révélé plus musclé : « La société se droitise », a expliqué en substance un Christophe Barbier décomplexé. « L'Express ne peut pas se déconnecter de ce lectorat. La une cible les tripes. C'est à l'intérieur qu'on s'adresse aux cerveaux. » Traduction : L'Express doit attirer le lectorat par des unes provoc, éventuellement putassières… quitte à l'éduquer ensuite dans ses pages, avec un dossier plus nuancé et argumenté. Christophe Barbier appelle ça « l'élasticité ».
Autre point évoqué par le directeur de la rédaction : la concurrence – Le Point surtout, mais aussi Marianne ou le Nouvel Obs – qui multiplient les unes agressives. « Une course à l'échalote » à laquelle personne n'échappe plus : « On ne peut plus se permettre des couv' tièdes », a asséné le directeur de la rédaction. Les unes positives ne marcheraient plus. Par exemple, une couverture sur le même sujet, mais titrée : “Immigration : une chance pour la France ?”, comme le suggérait un journaliste de la rédaction, « n'aurait pas fait de “buzz négatif”. » Or, faire du « buzz négatif », c'est faire du buzz. C'est bon pour les ventes, l'exemple récent était le numéro sur « Ces femmes qui gâchent la vie [de François Hollande] », qui a bien marché. Et ça donne une visibilité.
Intéressant débat, qui dépasse largement la rédaction de L'Express. Comment attirer le lecteur quand on est un hebdo ? Les rédactions parisiennes sont-elles déconnectées de la société ? Jusqu'où caricaturer les couv' pour être visibles, et vendre ? Jusqu'où prendre le risque de trahir son identité, griller son image ? Ce matin, à L'Express, la rédaction a eu les réponses de son patron. Mais est repartie pleine de questions.

 

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Voir aussi cet autre article plus complet  sur le traitement de l'islam dans les hebdos, paru sur ACRIMED en mai 2011

 

ACRIMED, le 6 novembre 2012

Les obsessions islamiques de la presse magazine

par Julien Salingue

 

« Cet islam sans gêne ». La semaine dernière, la « une » du Point a beaucoup fait parler d’elle, suscitant critiques, témoignages de soutien et nombreuses parodies. Mais trop rares sont celles et ceux qui ont fait remarquer que la couverture du Point était tout simplement, force est de le reconnaître, dans l’air du temps. En effet, le magazine dirigé par Franz-Olivier Giesbert n’en est pas à son coup d’essai, pas plus qu’il n’est le premier à espérer qu’une « une » inquiétante, démagogique et racoleuse sur l’islam augmenterait ses ventes. La compétition dure malheureusement depuis plusieurs années, comme le montre ce montage, qui offre un panorama (non exhaustif) de l’engouement orientaliste de la presse magazine (pour zoomer, cliquer sur l’image).

 

Vous avez dit « obsession » ?

 

De gauche à droite et de haut en bas : Valeurs actuelles (20 janvier 2011), L’Express (11 juin 2008), Le Point (21 janvier 2011), Le Point (22 mars 2012), Le Nouvel Observateur (3 novembre 2011), Le Point (3 février 2011), Valeurs actuelles (6 octobre 2011), L’Express (30 octobre 2008), Valeurs actuelles (4 octobre 2012), L’Express (6 octobre 2010), Le Point (6 janvier 2011), Valeurs actuelles (23 décembre 2010), L’Express (26 septembre 2012), Valeurs actuelles (29 mars 2012), Le Point (1er novembre 2012), Marianne (13 mai 2011).

 

 

Post-Scriptum (le 13 novembre 2012)

 

À la suite de la publication de l’article, un internaute nous a écrit pour nous signifier que ces 16 « unes », couvrant cinq titres et une période de plus de deux ans, ne représentent que 3% des 540 couvertures parues et ne sauraient donc montrer une quelconque « obsession » des hebdomadaires en question pour l’islam.

 

Si d’un strict point de vue comptable l’objection semble pertinente, le problème posé par les "unes" que nous avons collectées n’est pas que quantitatif. Il est aussi qualitatif. Car ce ne sont pas simplement des "unes" portant sur "le sujet de l’islam". Ce sont des couvertures inquiétantes, menaçantes, racoleuses. Elles renvoient toutes, sans exception, une image négative de l’islam, en faisant des généralités abusives ("L’occident face à l’islam", "Islam : les vérités qui dérangent", etc.), en se centrant sur des pratiques ultra-minoritaires ("Enquête sur le djihad en France", "Burqa : ce qu’on ne dit pas", etc), ou en employant de manière performative le mot "peur" [1].

 

La compilation de ces "unes" montre une chose : les grands titres de la presse magazine, et notamment L’Express, Le Point et Valeurs Actuelles, font régulièrement (2 ou 3 fois par an) une "une" sensationnaliste sur l’islam. Et la récurrence de ces "unes" participe, dans la durée, de l’instauration d’un climat délétère et de la banalisation progressive de la stigmatisation de l’islam et des musulmans. D’autant plus qu’au regard des dates, le rythme a tendance à s’accélérer...

 

Il est à ce titre cocasse de constater que malgré cette récurrence, chacune de ces "unes" est en général accompagnée d’articles expliquant qu’il est difficile, voire dangereux, de critiquer l’islam, et qu’il s’agit de "briser un tabou"... qui a été "brisé" quelques semaines plus tôt par un autre titre, lequel ne faisait que "briser le tabou" déjà "brisé" quelques semaines plus tôt, etc.

 

D’ailleurs, deux jours après la publication de l’article, nous découvrions la nouvelle "une" de Valeurs Actuelles (daté du 8 novembre) :

 

 

Donc oui, tout cela commence à ressembler à une obsession…

 

Notes

[1] Pour un article plus "analytique" sur le traitement de l’islam, voir ce que nous avions écrit l’an passé au sujet de Marianne.




27/11/2012

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