Vigilance Isère Antifasciste

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Ras L' Front face au retour en force du FN : entretien avec René Monzat

par NPA, le17 avril 2012 :

Ras l’front : face au retour en force du FN

 

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René Monzat, parmi les fondateur de Ras l’front dans les années 90, nous a accordé un entretien, durant le Forum social antiraciste (FSA) le 7 avril dernier.

En 1990, l’appel de 250 personnalités avait permis de dégager un espace politique pour lancer le réseau Ras l’front. Alors que le FN progresse, il semble que la situation soit plus compliquée aujourd’hui.
Je pense que c’est difficile effectivement, pour des raisons qui tiennent au changement de contexte politique. Quand l’Appel des 250 a été lancé, le Front national était un phénomène massif encore relativement nouveau. Il avait une activité militante contre laquelle il était « facile » de se mobiliser. De plus, le contexte politique faisait que, d’une certaine façon, Ras l’front pouvait exprimer un certain nombre de choses qui étaient au cœur de sa démarche, qui étaient aussi des valeurs qui, sur le papier en tous cas, étaient partagées par l’ensemble du champ politique à gauche.
Rien de tout cela n’existe aujourd’hui, le FN existe depuis longtemps, il a diminué, puis il a remonté... Donc les gens se disent qu’il ne constitue pas un réel danger, qu’il va baisser de nouveau, et, surtout, il y a une division très profonde, le FN n’est pas vu simplement comme un parti raciste, mais comme un parti qui pose, de façon peut-être extrême, des problèmes qui sont réels, qui sont les problèmes de l’identité française, de le mauvaise intégration de populations musulmanes, etc. Ils pensent que c’est le fond. Peut-être que s’il y avait une initiative, par exemple après les présidentielles, il pourrait y avoir un écho. Aujourd’hui, on se voit au FSA, il y a du monde, ce n’est pas extrêmement large, il n’y a pas les organisations politiques et syndicales majoritaires de la gauche, néanmoins il y a une initiative unitaire, ici à Saint-Denis, une manifestation de rue, plein d’initiatives dans plein d’endroits : Lille, Grenoble, Lyon... Je pense que de ce point de vue, les choses reprennent.

Avec un FN qui pèse autour de 15 %, et qui va de toute façon compter dans la période qui vient, les contradictions internes à la droite, on peut envisager une alliance entre une partie de la droite institutionnelle et le FN, et l’aspiration d’une représentation proportionnelle au Parlement.
Existe-t-il d’après toi un risque de recomposition politique entre une partie de la droite et le FN ?
Oui, c’est la stratégie de Marine Le Pen. Elle parie sur la défaite de Sarkozy et un éclatement de l’UMP, et une recomposition entre le FN et une partie de l’UMP dont on a vu depuis des mois qu’il reprend des termes qui chaque semaine sont plus proches de ceux de l’extrême droite. Ce sera vraiment une autre situation politique, lourde de dangers. Il faut se préparer à des choses surprenantes et pas forcément agréables après les élections.
Le retour à une forme de proportionnelle fait partie des propositions du PS, ce qui est une chose juste par ailleurs. Cela ne nous fera certainement pas plaisir s’il y a des députés du FN à l’Assemblée, mais il ne faut pas revenir sur ce principe démocratique au prétexte que le FN pourrait en bénéficier.

Dans l’Appel des 250 était écrit que l’on commençait le combat contre les fascistes en les nommant comme tels. Il y avait une continuité générationnelle (Résistance, guerre d’Algérie, Mai 68) qui permettait de le faire. Nous ne sommes plus dans cette dynamique.

Doit-on alors mener le combat contre le FN en le traitant comme un parti comme les autres ? Par exemple, pour la tenue du meeting central à Paris au Zénith le 17 avril, on assiste à une hésitation des forces politiques à gauche pour prendre une initiative à cette occasion.
Il y a d’une part le débat « académique » sur la définition de ce qu’est le FN. C’est un parti de la « droite révolutionnaire » mais différent du fascisme et du nazisme, mais c’est le même courant politique fondamental incarné de façon différente. C’est un débat qu’il faut avoir. Le problème est qu’un tel parti, avec son programme de préférence nationale, un parti autoritaire, qui s’inscrit dans une tradition antidémocratique, même si aujourd’hui il prétend le contraire, ne doit pas être traité de la même façon qu’un parti de la droite parlementaire traditionnelle. Il est légitime de manifester, de dire des choses, et de souligner que sur le fond politique, il n’a pas changé. Il suffit de gratter un peu. En réalité, le FN ne s’est pas transformé en parti classique, démocratique, ce n’est pas vrai. Il est dans l’approfondissement de ce qu’il a toujours été, avec plus de capacités et l’intelligence politique de dire fondamentalement les mêmes choses de façon plus « séduisantes ». Le problème est qu’il va sans doute connaître des succès directement électoraux avec une activité militante qui pour l’instant reste extrêmement faible. Donc oui, cela a un sens de manifester le 17 contre le FN, mais ce serait une illusion d’en rester là !

Propos recueillis par Alain Pojolat



16/04/2012

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